« Je demande à nos concitoyens de faire preuve de responsabilité, de ne pas relayer les fake news qui fleurissent sur les réseaux, ni d’alimenter la panique », a souligné Paul Néaoutyine dans une communication la semaine passée. La province Nord mène bataille face à l’épidémie de la Covid-19 dans le pays. Son président Paul Néaoutyine insiste sur le respect des consignes sanitaires, et détaille les mesures, notamment économiques, adoptées par l’institution de Koné. Des entreprises sont touchées.
-Quelle est aujourd’hui votre plus grosse crainte dans cette lutte contre le coronavirus Covid-19 ?
D’abord, je tiens à assurer de mon soutien les personnes hospitalisées atteintes par le coronavirus ainsi que leurs familles. Je leur souhaite un prompt rétablissement. Ensuite, j’apporte ma solidarité au peuple de France qui vit une situation particulièrement difficile ainsi qu’aux autres peuples du monde affectés par la pandémie.
Ma crainte est celle de tous les Calédoniens : que l’épidémie se propage partout dans le pays avec son cortège de souffrances et ses conséquences sanitaires, sociales et économiques catastrophiques. Pour en revenir à votre question, elle devrait être formulée à l’inverse : en quoi avez-vous le plus confiance dans la lutte contre la Covid-19 ? J’ai confiance dans le peuple de mon pays qui, globalement, fait face en respectant le confinement et les gestes barrières. Dans ce combat, j’apporte mon soutien au gouvernement avec lequel la province Nord est en lien quotidien. L’instrumentalisation politicienne de la crise par certains n’est pas de mise.
-La province a commandé 500 000 masques. Qui en seront les bénéficiaires ?
Sur les 500 000 masques, 100 000 sont des masques FFP2, et 400 000 des masques chirurgicaux destinés en priorité aux personnels médicaux et aux personnes en contact avec les cas potentiels. J’invite les pharmacies et les entrepreneurs dont les salariés peuvent être exposés à passer commande eux aussi. J’ajoute que nous avons également passé commande de respirateurs. A ce propos, la société Air Liquide France étant débordée, la livraison n’est prévue que pour juin. Nous avons demandé au gouvernement la réduction des délais. Peut-être conviendra-t-il de chercher un fournisseur dans un autre pays ?
-Le Centre hospitalier du Nord (CHN) est-il en mesure de traiter d’éventuels cas déclarés ?
A ce jour, 110 tests ont été pratiqués dans nos trois CHN : Koné, Poindimié, et Koumac. Aucun cas positif n’a été détecté. Pour autant, j’invite nos concitoyens du Nord à ne pas relâcher leur vigilance. Nous avons mis en place une procédure d’accueil des cas suspects dans nos CMS (centres médicosociaux) qui permet de les recevoir séparément des autres patients. C’est au médecin qu’il revient de prescrire les tests. Ceux-ci sont réalisés par nos trois centres hospitaliers du Nord. Nous avons saisi le gouvernement pour qu’il puisse réquisitionner les hôtels du Nord, à l’instar de ce qu’il a fait dans le Sud, afin de confiner les personnes venant faire leur test, dans le but que toutes les précautions soient prises.
-Test négatif ou positif : quelles sont les dispositions ?
Si le test est négatif, les personnes rentrent chez elles. Nous avons saisi la commission de contrôle de la Cafat pour le transport des cas suspects. Si le test est positif, les personnes sont dirigées vers le Médipôle. C’est ainsi que les choses ont été arrêtées en accord avec le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, compétent en matière de santé. Pour l’heure, le Pôle sanitaire de Koné n’accueille pas de malades du coronavirus. Espérons qu’il n’aura pas à le faire. Un numéro vert est en fonctionnement, le 05 00 70. Je précise aussi que les allocations minimum vieillesse ont été mandatées. Les droits des bénéficiaires de l’aide médicale gratuite arrivant à expiration, seront reconduits automatiquement et prorogés jusqu’au 30 avril.
-La communication sur le virus et les gestes barrières sont-ils bien passés en tribu ?
Globalement, oui. Mais il faut toujours rappeler les consignes, en tribu comme dans les villages. Chacun doit être responsable de soi pour l’intérêt de tous. De façon générale, les consignes sont suivies à la lettre même s’il se trouve toujours des individus dans le Nord comme ailleurs qui les enfreignent et même qui commettent des délits. A ce propos, je condamne, avec la plus extrême sévérité, les incendies volontaires qui se sont produits dans l’enceinte du collège de Koné et au CMS de Poum. Heureusement, ces actes, rejetés par la population, sont le fait d’une toute petite minorité.
-Vous avez annoncé une future prise en charge partielle des cotisations Ruamm. Quel sera le dispositif ?
J’entends certains commentateurs demander s’il faut privilégier l’homme ou l’économie. En vérité, il n’y a pas de contradiction entre les deux termes, car c’est l’homme qui est au centre de toutes nos préoccupations, et c’est aussi l’homme qui fait fonctionner l’économie d’un pays. J’en profite pour saluer les travailleurs qui continuent d’exercer leurs activités dans les secteurs économiques nécessaires à la vie quotidienne.
La province Nord dispose dans son Codev (code de développement, Ndlr) d’un arsenal de mesures d’aide déjà existantes. Nous avons instauré un guichet unique (47 72 39) qui permet aux entrepreneurs d’entrer en contact avec la province. Dans le Nord, hormis les filiales de groupes du Sud, nous avons surtout des PME et des patentés.
-Des sociétés sont-elles aujourd’hui fragilisées ?
Certaines entreprises sont particulièrement touchées : les garderies, la construction, les sociétés d’entretien, etc. Elles ont parfois des échéances à rembourser. En sus des mesures de droit commun - chômage partiel, fiscalité, social et banques -, la province Nord modifiera son code de développement pour permettre la prise en charge partielle des cotisations Ruamm et le report des redevances pour occupation de foncier et d’équipements provinciaux. Cette aide provinciale qui s’élève à 130 millions de francs pour un trimestre, viendra en complément du Fonds de solidarité de l’État lorsqu’il sera opérationnel. C’est une somme non négligeable rapportée à la population du Nord. Une assemblée de province sera prochainement convoquée à ces fins. Les paiements en cours, notamment au BTP, sont accélérés mais le règlement ne dépend pas que de la province, il passe par le Trésor public. La province Nord est mobilisée. L’école de Téari accueille en ce moment dix enfants dont les parents sont réquisitionnés sur le terrain dans la lutte contre la Covid19. Nos internats sont prêts à fournir les repas nécessaires en cas de nécessité imposée par le confinement. En ces temps agités, j’invite nos concitoyens à rester confiants dans l’avenir.
« L’instrumentalisation politicienne de la crise par certains n’est pas de mise. »