Face à la pandémie mondiale, et sans attendre que le virus circule en Nouvelle-Calédonie, le président de la province Nord Paul Néaoutyine souhaite sensibiliser la population à la nécessité de se faire vacciner pour atteindre l'immunité collective nécessaire pour éviter un engorgement des services hospitaliers. Se faire vacciner pour se protéger soi-même et protéger les autres.
Le pays : Vous êtes-vous fait vacciner et si oui pourquoi ?
Paul Néaoutyine : J'ai toujours défendu la thèse qu'il faut être acteur de son destin. C'est valable en politique, ça l'est aussi en matière de santé. Oui, j'ai fait la démarche pour être vacciné. La vaccination n'étant pas obligatoire, il revient à chaque citoyen de faire la démarche en toute conscience et en toute connaissance de la nécessité de se protéger soi-même et de protéger les autres. Si le virus entre dans ma famille, dans ma tribu que va-t-il se passer ? Se vacciner, c'est élever un barrage contre cet ennemi qui sème la mort et la désolation comme on peut le constater partout dans le monde, en Europe, au Bresil ou en Inde.
Le pays : Il y'a pourtant de fortes réticences à se faire vacciner dans une partie non négligeable de la population...
Paul Néaoutyine : Aujourd'hui en Province Nord, seulement 11% de la population totale est vaccinée et seulement 15% des plus de 20 ans. On est loin des 70% nécessaires pour atteindre une immunité collective, autrement dit une protection générale contre le virus. Je dois rappeler à chacun de nos concitoyens que la COVID-19 est une maladie très grave, très contagieuse, trop souvent mortelle générée par un virus, qui mute en plusieurs variants, ce qui renforce la dangerosité de l'épidemie. Je rappele aussi qu'il n'y a pas de traitement et que le seul moyen de se prémunir, c'est la prévention, c'est à dire le vaccin qui empêche le développement de formes graves de la maladie et réduit les risques de contamination. On a la chance de pouvoir se protéger avant qu'une épidémie ne se déclenche dans le pays puisque le virus ne circule pas encore. Il faut profiter de ce moment pour se faire vacciner avant qu'il ne soit trop tard. Il faut que nos concitoyens sachent que l'on dispose de très peu de places en réanimation, une cinquantaine de lits de réanimation à l'échelle du pays mais qui sont en partie occupés par des patients atteints d'autres pathologies. Si le virus est réintroduit, on ne pourra pas faire face, d'où l'importance de la vaccination. Je sais que certains de concitoyens influencés par les fake-news diffusés sur les réseaux sociaux ne veulent pas se faire vacciner ou se disent qu'il vaut mieux attendre de voir. On entend des absurdités comme quoi le vaccin nous injecterait en même temps une puce. Certains répandent la méfiance en disant qu'on ne sait pas ce qu'il y a dans le vaccin. C'est faux, on sait très bien ce que le vaccin contient. On le sait même mieux que la plupart des médicaments qui nous sont prescrits par notre médecin et pour lesquels, souvent, nous ne posons même pas la question.
Le pays : Notre population est-elle particulièrmenet vulnérable ?
Paul Néaoutyine : Très clairement oui.Historiquement, les épidémies de rougeole, de tuberculose, de lèpre, de grippe espagnole, arrivées avec la colonisation ont durement touché les peuples autochtones dont nous sommes parce qu'ils n'étaient pas immunisés. Ces épidémies sont inscrites dans notre mémoire collective. Quelle est la situation aujourd'hui ? Dans notre pays il y a 53 000 personnes qui présentes des pathologies lourdes : diabète, obésité, etc... et qui sont en longue maladie. Ce sont des personnes particulièrment vulnérables en cas d'introduction du virus. Ceci dit on constate que le virus, s'il frappe plus durement les personnes d'un certain âge dont les défenses immunitaires sont émoussés, il touche aussi maintenant les plus jeunes. Personne n'est à l'abri. En Océanie, on a une mode de vie communautaire qui favorise la propagation rapide du virus. Il est donc urgent de ne pas attendre et de se faire vacciner maintenant d'autant plus que les doses de vaccins se périment si elle ne sont pas utilisées. Je rappelle aussi que pour le moment la vaccination est gratuite. J'invite donc tous nos citoyens à se faire vacciner sans attendre. Il en va de notre bien le plus précieux, la vie.
Source : Magazine Le Pays n°173 juin 2021